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Hédo
19 février 2007

Plutarque

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Plutarque 

Des opinions des philosophes

La présente édition du traité _Des Opinions des philosophes_ appelle, en guise de Préface, un certain nombre de remarques, et sur le fond, et sur la forme. Pourquoi se soucier, tout d'abord, de publier ce texte, puisqu'il existe des traductions complètes des OEuvres de Plutarque en langue moderne? La Loeb Classical Library, d'une part, donne une édition avec traduction anglaise des _Moralia _ (en 17 volumes) et des _Parallel Lives _(en 11 volumes); aux éditions des Belles-Lettres, dans la collection des Universités de France, d'autre part, sont publiées et traduites les _Vies parallèles,_ et cours de publication les _OEuvres morales._ On peut encore ajouter qu'une traduction des _Vies parallèles,_ celle de J. Amyot, est également publiée aux éditions Gallimard, dans la collection de la Pléiade.

On chercherait cependant en vain le titre que nous présentons dans tous ces volumes, et ceci pour la raison après tout défendable qu'il s'agit d'un écrit apocryphe. Le véritable auteur des Opinions des Philosophes n'est pas Plutarque de Chéronné - qu'il convient de bien distinguer de Plutarque d'Athènes : ce dernier fut l'un des scolarques de l'école néoplatonicienne d'Athènes, et l'un des maîtres de Proclus. Plutarque de Chéronnée est un historien et philosophe grec qui vécut à la fin du Ier siècle et au début du IInd siècle après Jésus-Christ. Et, s'il est l'auteur des _Vies parallèles_ et des _OEuvres philosophiques et morales_, traduites par J. Amyot au XVIème siècle, il n'est pas l'auteur de ce recueil d'_Opinions_ (ou _placita_ en latin, ou _stromates_ en grec, qui signifie bigarrure, chose composite -- nous dirions : un _patch-work_, ce qui rend assez bien l'impression que dégage cet écrit). Du véritable auteur, nous ne savons rien, et devons nous résigner à l'appeler le Pseudo-Plutarque (ou encore : [Plutarque], en adoptent les conventions modernes). Tout ce que nous savons, c'est que ces Stromates sont composée en suivant un modèle : celui du doxographe, ou collecteur d'opinions des philosophes anciens, Aétius. De cet auteur, à nouveau, on ne sait rien... Mais le philologue allemand Diels a démontré, dans son ouvrage _Doxographi Græci,_ Berlin, 1879, que les _Placita _d'Aétius étaient la plus ancienne version de ce type de recueil, que l'on pourrait appeler d'un titre générique : _Recueil d'opinions des philosophes._

Qu'on nous pardonne de nous attarder sur ces détails qu'aucuns jugerons gratuitement érudits, mais la chose est indispensable si l'on veut comprendre exactement de quoi il s'agit. Le Pseudo-Plutarque recopie Aétius, lequel recopie un Recueil dont l'archétype renvoie à la plus haute antiquité : la lecture du traité que nous republions ici donne donc accès,
de façon certes indirectes, mais la seule encore possible, à certains systèmes de pensées de la plus haute Antiquité. Aristote lui-même, au premier livre de sa _Métaphysique, _ est l'auteur d'un semblable recueil, lorsqu'il expose les opinions ou thèses des philosophes qui l'ont précédés sur la question du nombre et de la nature des causes et principes qui président à toutes réalités. Dans une question difficile, Aristote conseille en effet de prendre soin, au préalable, d'exposer la doctrine des penseurs qui en ont déjà traité - présentation qu'il appelle dialectique -, avant que de la critiquer, de sorte à approcher plus aisément de la vérité. Dans cette perspective à la fois historique, critique et heuristique, il devient essentiel de constituer semblables recueils à celui qui nous occupe ici. Aristote fut le premier à ouvrir la voie à ce style. Même s'il arrive à Platon (par exemple dans le _Sophiste)_ de donner un expression des philosophes qui l'on précédés, il n'est en effet pas certain qu'il soit très fidèle à leurs écrits. Lisons un peu ce qu'explique mon bon maître Jean-Paul Dumont, traducteurs des _Présocratiques _dans la Pléiade :

" Théophraste, le successeur immédiat d'Aristote, dont il était l'élève, à la tête du Lycée [Note 1], a mis systématiquement en pratique l'impératif dialectique lié à la pédagogie de son maître, et fait établir à cet usage des recueil ou collections d'opinions - plus tard désignés du nom latin de Placita. La première édition en fut très tôt perdue. Mais l'histoire de ses copies successives a constitué le premier travail de Hermann Diels - le ressembleur des textes présocratiques que nous lisons ici - aboutissant à son édition grecque des _Doxographi græci,_ à Berlin, en 1879. Il y établir que le plus ancien recueil théophrastien d'opinions - les _Vetusta placita_ - a été recopié ou réédité par un certain Aétius, savant de date inconnue et dont l'ouvrage est lui aussi perdu, mais a par chance été recopié par deux auteurs dont l'un, le pseudo-Plutarque, est inconnu, et l'autre est Jean Stobée, qui a édité le _Choix _de textes au Ve siècle de notre ère. Diels en offrait une édition synoptique sur deux colonnes. Ainsi est née, avec Aétius, la doxographie scolaire : elle consiste en des recueils de philosophie par les textes ou en ce que les éditeurs d'Outre-Manche appellent des _Source books,_ destinés à alimenter la réflexion des jeunes gens étudiant la philosophie [Note 2]. "

On voit par là que le texte du Pseudo-Plutarque, tel qu'il est traduit dans la langue savoureuse du XVIe siècle par J. Amyot, présente un quadruple intérêt (en attendant une traduction précise des _Doxographi græci _ de Diels). Tout d'abord, parce que, de Théophraste à Aétius, et d'Aétius à Stobée et au Pseudo- Plutarque, il permet de remonter à une époque quasi-contemporaine d'Aristote. Ensuite, parce que de cette époque et de celles qui suivent, bien des ouvrages ont disparu : ainsi le Stoïcisme ancien, puisque les OEuvres de Zénon de Cittium, de Chrysippe et Cléante sont entièrement, ou peu s'en faut, perdues, la doctrine d'Epicure, dont trois lettres seulement nous ont été conservées par Diogène Laërce, ou encore des Présocratiques dans toutes leur diversité, et de bien d'autres, ne nous sont au fond accessibles que par des témoignages, au rang desquels le traité _Des Opinions des philosophes _ vient naturellement prendre une place privilégiée. Pourquoi en donner la version de J. Amyot ? Non pas seulement pour le plaisir de la langue de ce siècle. Mais parce qu'elle se situe à l'aurore d'une révolution qu'on a coutume de nommer la copernicienne ou la galiléenne. Sans doute faudrait-il se plonger profondément dans l'histoire de la Renaissance pour prouver les affirmations suivantes, mais la place et le temps manque malheureusement ici : les savants de la Renaissance furent très tôt à la recherche de modèles scientifiques permettant d'échapper à l'emprise de l'aristotélisme; or, de ce point de vue, l'atomisme épicurien et le matérialisme stoïcien s'offraient à eux naturellement. Et cela est une troisième raison de privilégier la traduction de J. Amyot. Pour ne prendre qu'un exemple, on parle souvent des éléments stoïciens à l'oeuvre dans les traités de Descartes (par exemple dans les _Principes de la philosophie naturelle,_ ou dans le _Traité des Passions de l'Âme)_, ou de l'atomisme de Gassendi : une comparaison précise des thèses exprimées par ces savants (ainsi, généralement, que par ceux des XVIè, XVIIè et XVIIè siècle) pourrait peut-être permettre de mieux mesurer leurs sources, leur degré d'originalité vis-à-vis de ces sources et, par là, la ce qui relève chez eux de l'invention conceptuelle à proprement parler.

Il reste un quatrième type de raisons à mettre en avant : et qui est celui, purement et simplement, de ne pas laisser perdre les textes, mais au contraire de les rendre accessibles directement à l'honnête homme du XXè siècle, lequel, qui plus est, aux commandes de son ordinateur, dispose désormais d'un outil d'exploitation matériellement supérieur aux instruments de papier des érudits de la Renaissance.

Le Traité des _Opinions des Philosophes_ est composé de cinq livres. Il est visible, à la lecture des gloses que J. Amyot a cru bon d'ajouter au texte, qu'il a certainement cru y lire quelque chose qui ressemblait à une _somme._ Non pas seulement du modèle de celle que saint Thomas d'Aquin nous a laissé sous le titre de _Somme Théologique,_ mais encore de celle que Descartes rêvait d'écrire, lorsqu'il parle, dans une lettre à Huygens du 29 Juillet 1641, de sa "Physique, ou plutôt le sommaire de toute la Philosophie", et qu'il prubliera sous le titre des _Principes de la philosophie._ Il ne faut jamais oublier, si l'on veut comprendre à quoi l'on a affaire, que c'est de la notion de somme ou de sommaire que l'arbre de toute la philosophie (cf. Lettre-Préface, AT IX-2, 26, rééd. Vrin, p. 14, li.23 & sv.), dont les racines sont la Métaphysique, le tronc la Philosophie naturelle (= la Physique) et les trois branches, respectivement, la Mécanique, la Médecine et la Morale, est une illustration de cette notion de somme, laquelle est "un corps de Philosophie tout entier" (idem, AT IX-2, 30 = Vrin 17,9), c'est-à-dire tout simplement de l'ensemble des savoirs existants.

C'est à quelque chose de comparable, ou tout au moins de semblable aux recueils de _Question naturelles,_ de Pline, de Sénèque, ou d'autres, dans lesquels on puisait alors bien des doctrines scientifiques, que J. Amyot a certainement cru avoir affaire.

L'objet général du traité du Pseudo-Plutarque, c'est la nature, par opposition à la philosophie morale et à la philosophie verbale (I, préf.) : entendons par-là qu'il ne s'agit ni d'éthique, ni de logique, mais de la science qui chercher les principes de tout ce qui existe par nature (et non du fait de l'action, ou du raisonnement humain). C'est en ce sens que cette collection d'opinions traite d'abord des principes incorporels et éternels (I) puis des principes célestes ou supra-lunaires, c'est-à-dire corporels et éternels (II) avant de passer aux réalités sublunaires (III à IV), elles-mêmes soigneusment classées : celles qui sont au- dessus de la terre et au-dessous du ciel et de la Lune, les Météores (III); celles qui sont terrestres et touchent à l'âme (IV); et, enfin, celles qui sont terrestres et corporelles, tuchant à la vie (V).

Le Premier Livre, en effet, pour objet les principes et les réalités métaphysiques - ou plus exactement tout ce qui se range des principes, éléments et causes (I, chap.II, jusqu'à la nécessité, la destinée et la fortune (I, chap.XXIX). On passe alors, avec le deuxième livre à l'examen des réalités corporelles : du monde (II, chap.I) à la Lune et au calendrier (II, chap.XXXI & XXXII). Sous la Lune, il faut alors ranger les réalités sublunaires, qui sont corporelles (comme l'étaient les réalités supralunaires : planètes, étoiles, etc.), mais aussi temporelles et non éternelles : le Livre III du traité des _Opinions des Philosophes _ ressemble ainsi à un un traité des _Météores._ Avec le Livre IV, on passe à l'examen des réalités terrestres, en commençant par les réalités psychiques, de l'Âme en général (IV, chap. II) aux facultés de l'âme (jusqu'au chap. XXI), en passant par les différentes formes d'âme, son immortalité, etc. Vers la fin du quatrième Livre (chap. XXII & XIII), on trouve des considérations sur les liens de l'âme et du corps; au début du livre V, sur les images des la divination et des songes (Chap. I & II). Le Livre V a pour objet les réalités terrestres inférieures à l'âme : de la semence générative (V, chap. III), qui en est issue, à la santé du corps (V, chap.XXX) en passant, par la description des processus de génération, de développement de l'embryon. Ce qui peut sembler à un lecteur non averti des XVIè et XVIIè siècle un cours complet de philosophie naturelle, est en réalité un catalogue d'opinions des auteurs anciens, portant sur tous les sujets auxquels les philosophes de toutes les écoles avaient coutume de s'intéresser.

Le présent travail de copie obéit aux principes suivants :

1° Le texte _Des Opinions des Philosophes,_ du Pseudo-Plutarque a été copié dans l'édition des _OEuvres Mêles _ de Plutarque, traduites par Jacques Amyot à la Renaissance. Cf. Copie de la page de garde du tome second en _incipit._

2° J'ai renoncé à suivre systématiquement l'orthographe et la graphie de l'époque, que j'ai donc modernisée, partout où j'ai estimé qu'elle faisait entrave à la lecture.

3° La pagination originale a été systématiquement conservée entre crochets [].

4° Les anotations et divisions ajoutées en marges par J. Amyot sont également conservées. Les intertitres numérotés en chiffres romains ajoutés en marge ont ainsi été replacés en tête des paragraphes concernés (dans un caractère plus petit). Il convient de leur porter attention, au moins en ce sens : si, dans leur teneur générale, ces gloses ne sont que des extraits du texte du Pseudo- Plutarque, elles comportent parfois des remarques critiques ou réfutatives - en particulier pour ce qui regarde la dimension de la religion et de la théologie - qui témoignage de l'état d'esprit dans lequel on lisait pareil texte à cette époque.

5° La ponctuation a été conservée telle quelle.

6° Les mots d'ancien français dont l'usage s'est perdu depuis l'époque de J. Amyot sont traduit en notes (ce sont les définitions du _Dictionnaire de l'Académie Française, _ dans l'édition de 1740, du _Dictionnaire d'Ancien Français _de Gransaignes d'Hauterive, ou du _Dictionnaire de l'Ancien Français jusqu'au milieu du XIVè siècle _de Greimas qui sont fournies).

7° Mes notes sont regroupées à la fin du fichier. Elles sont indiquées par [Note XX].

Eric DUBREUCQ

III. Anaximène estime que ce soit l'air. Est réfuté.

ANAXIMENE Milésien aussi maintient, que l'air était le Principe de l'univers pour ce que toutes choses étaient engendrées de lui, & derechef se résolvaient en lui : comme notre âme dit-il qui est air, nous tient en vie, aussi l'esprit & l'air contient en être tout ce monde : car esprit & air sont deux noms qui signifient une même chose, mais celui-ci faut [258] aussi, pensant que les animaux soient composés d'un simple & uniforme esprit & air : car il est impossible qu'il n'y ait que un seul Principe de toutes choses, qui est la matière, ains faut & quand supposer la cause efficiente : ni plus ni moins que ce n'est pas assez d'avoir l'argent pour faire un vase, s'il n'y a ensemble la cause efficiente qui est l'orfèvre : autant en faut-il dire du cuivre, du bois, & de toute autre matière.

VI. Pythagore & ses disciples tiennent que les nombres sont les Principes de toutes choses. Quel était le plus grand serment des Pythagoriques & pourquoi. Que représente le deux. Que représente le trois.

D'AUTRE part Pythagore, fils de Mnésarchus natif de l'île de Samos, le premier qui a donné le nom à la Philosophie, a tenu que les principes des choses étaient les nombres, & les symmétries, c'est-à-dire, convenances & propor [259] tions qu'ils ont entr'eux, lesquelles il appelle autrement Harmonies : & puis les composés de ces deux Eléments qu'on dit Géométriques. Derechef il met encore entre les Principes, l'Un & le Deux indéfini, & tend l'un de ces principes à la cause efficiente & spécifique, qui est l'entendement, c'est à savoir Dieu : l'autre à la cause passive & matérielle, qui est ce monde visible. Davantage il estimait que Dix était toute la nature du nombre, pour ce que les Grecs et les Barbares tous comptent jusqu'à dix, puis quand ils y sont arrivés jusqu'à la dizaine, il retournent derechef à l'unité. Et outre disait encore que toute la puissance de dix consiste en quatre, c'est-à-dire au nombre quaternaire : & la cause pourquoi, c'est que si on recommence à l'un, & que selon l'ordre des nombres on les ajoute jusqu'au quatre, on fera le nombre de dix, & si on surpasse le quaternaire, aussi surpassera-t-on la dizaine : comme si on met un & deux ensemble, ce sont trois, & trois avec sont six, & quatre après ce sont dix, de sorte que tout le nombre, à le prendre d'un à un, git en dix, & la force & puissance en quatre. Et pourtant les Pythagoriques soulaient [Note 3] jurer, comme par le plus grand serment qu'ils eussent su faire, par le quaternaire,

Par le Saint Quatre, éternelle nature

Donnant à l'âme humaine, je te jure;

& notre âme, dit-il est composée de nombre quaternaire : car il y a l'entendement, science, opinion & sentiment, dont procède toute science & tout art, & dont nous-mêmes sommes appelés raisonnables. Car l'entendement est l'unité, pour ce qu'il ne connait & n'entend que par un, comme y ayant plusieurs hommes, les particuliers un à un sont incompréhensibles par sentiment, attendus qu'ils sont infinis, mais nous comprenons en pensée, cela seul Homme, & en entendons un seulement, auquel nul n'est semblable : car les particuliers qui les considèreraient à part sont infinis, ainsi toutes espèces & tous genres sont en unité & pourtant quand on demande de chaque particulier que c'est, nous en rendons une telle définition générale, c'est un animal raisonnable, apte à discourir par raison : ou bien animal apte à hennir. Voilà pourquoi l'entendement est unité, par laquelle nous entendons cela. Mais le deux & nombre binaire, indéfini, est à bon droit science : car toute démonstration et toute probation est une sorte de science : & davantage toute manière de syllogisme & ratiocination, collige & infère une conclusion qui était douteuse, de quelques propositions confessées, par où elle démontre facilement une autre chose, dont [260] la compréhension est science : par ainsi apert-il que science vraisemblablement est nombre binaire. Mais opinion bonne raison peut se dire le nombre ternaire de la compréhension, pour ce que l'opinion est de plusieurs. Or la ternaire est nombre de multitude, comme quand le Poëte dit, Ô Grecs heureux trois fois. C'est pourquoi Pythagore ne faisait point estime du trois, la secte duquel a été appelée Italique, pour autant que Pythagore, ne pouvant supporter la tyrannique domination de Polycratès, se partit de Samos, qui était son pays, & s'en alla tenir son école en Italie.

VII. Héraclite & Hippasus ont tenu que le feu était le principe de toutes choses.

HERACLITE & Hippasus de la ville de Meraponte ont tenu, que le feu était le principe de toutes choses, pour ce que toutes choses se font de feu, & se terminent par feu, & quand il s'éteind, tout l'univers monde en est engendré : car la plus grosse partie d'icelui se serrant & épaississant en soi-même se fait terre, laquelle venant à être lâchée par le feu, se convertit en eau, & elle s'évaporant se tourne en air : & derechef le monde, & tous les corps qui sont compris en icelui, seront un jour tous consumés par le feu par quoi il concluait que le feu était le principe de toutes choses, comme celui dont tout est : & la fin aussi, pour ce que toutes choses se doivent résoudre en lui.

VIII. Epicure dit que ce sont les Atomes ou corps indivisibles, & éternels & infinis, ayant pris cette opinion de Démocrite.

Epicure, fils de Noclés Athénien, suivant l'opinion de Démocrite dit, que les Principes de toutes choses sont les Atomes, c'est-à-dire, corps indivisibles, perceptibles par la raison seulement, solides sans rien de vide, non engendrés, immortels, éternels, incorruptibles, qu'on ne saurait rompre ni leur donner autre forme, ni autrement les altérer, & qu'ils ne sont perceptibles ni compréhensibles que par la raison, mais qu'ils se meuvent en un infini & par un infini qui est le vide, & que ces corps sont en nombre infini, & ont ces trois qualités, figure, grandeur & poids. Démocrite en mettait deux grandeurs & figure : mais Epicure y ajoute pour le troisième le poids. Car il est, disait-il, force que ces corps-là se meuvent par la percussion du poids, car autrement ne se mouvraient-ils pas : & que les figures de tels corps étaient compréhensibles, & non pas infinis, pour ce qu'ils ne sont ni forme de hameçon, ni de fourche, ni de annelet, d'autant que telles figures sont forts fragiles : & que les Atomes sont tels qu'ils ne peuvent être rompus ni altérés, & ont certaines figures qui sont perceptibles non autrement que par la raison, & s'appellent Atomes, c'est-à-dire indivisibles, non pour ce qu'ils soient les plus petits, mais pour ce qu'on ne les peut mespartir, d'autant qu'ils sont impassibles, [261] & qu'ils n'ont rien qui soit de vide, tellement que qui dit Atome, il dit infragible, impassible, n'ayant rien de vide. Et qu'il y ait des Atomes, il est tout apparent, parce qu'il y a des Elements éternels des corps vides, & l'unité.

IX. Empédocle dit que l'accord, & le discord sont les Principes de toutes choses.

EMPEDOCLE, fils de Meton, natif d'Agrigente, dit, qu'il y a quatre Eléments, le feu, l'air, l'eau & la terre & deux Principes ou facultés & puissances principales, accord & discord, dont l'un a force & puissance d'assembler & unir, & l'autre de désassembler & désunir .



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