Son propre censeur social OTIS du premier au dernier
Le panoptisme et le
redressement des morales
Sous-titré Naissance de la prison, Surveiller et punir est un ouvrage
majeur de Michel
Foucault paru aux éditions Gallimard en 1975.
Rêve de Jeremy Bentham, le panoptique
s'impose. Les prisons sont désormais construites selon des plans circulaires
permettant au surveillant situé dans une tour centrale d'observer sans jamais
être vu, les silhouettes des détenus se détachant à contre-jour sur des fenêtres
extérieures via d'autres fenêtres donnant sur une cour intérieure.
Cette
architecture permet éventuellement de se passer complètement de surveillant, le
seul sentiment d'être observé étant susceptible d'obtenir des captifs une forme
d'obéissance. Ainsi,
en plus de n'être pas coûteux d'un point de vue économique, la
prison moderne est d'abord une entreprise de culpabilisation
travaillant les consciences
individuelles à
travers un regard
tout-puissant.
Le succès
de ce système aidant, la seconde conséquence de sa mise en place est son adoption
par d'autres institutions que la seule prison, à commencer par l'atelier, où quelques
contremaîtres
suffisent désormais à contrôler des centaines de travailleurs : ils
déambulent à présent dans des allées rectilignes d'où ils dominent les employés
assis à une table individuelle et tous visibles de loin. On retrouve également
des méthodes carcérales dans les écoles, les pensionnats ou les casernes, où les
lits sont peu à peu alignés, les emplois du temps plus stricts, l'exercice et
la répétition valorisés.
Le
redressement des corps
humains auquel ces institutions procèdent chacune à sa façon conduit
selon Michel Foucault au redressement des morales, chacun devenant son propre
censeur une fois qu'il y a été corrigé par un concours d'organismes, tout au
long de sa vie.
Par un
fort maillage social, avec au centre la prison, ce n'est plus le souverain qui
est isolé, mais bien l'individu.