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Hédo
23 mai 2012

hédo providence

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SÉNÈQUE :  De la providence

Pourquoi les gens de bien sont sujets au malheur, lorsqu'il existe une providence   Traduction J. Baillard, 1914.

 

Les prospérités descendent sur le vulgaire, sur les âmes communes ; mais réduire à l’impuissance le malheur et tout ce qui fait peur aux mortels n’appartient qu’au grand homme. Jouir d’un bonheur constant et traverser la vie sans que rien ait froissé notre âme, ç’est ne pas connaître la seconde face des choses humaines. Tu es homme de courage : mais d’où puis-je le savoir, si le sort ne te donne les moyens de montrer ton grand cœur ? Tu es descendu dans l’arène ; si nul rival n’était là, la couronne est à toi, mais non la victoire. Ce n’est pas de ton courage que je te félicite, c’est d’avoir gagné comme qui dirait le consulat ou la préture : un titre, un avancement.

J’en puis dire autant à l’homme vertueux, si quelque passe difficile ne lui a donné, ne fût-ce qu’une fois, l’occasion de signaler sa vertu : je t’estime malheureux, pour ne l’avoir jamais été ; tu as traversé la vie sans combat. Personne ne saura ta force, tu ne la sauras pas toi-même. Pour se connaître il faut s’être essayé ; à l’œuvre seulement on apprend ce qu’on pouvait faire. Aussi a-t-on vu des hommes provoquer le malheur qui les respectait, et chercher à faire briller leur vertu près de s’ensevelir dans l’obscurité. Oui, le grand homme parfois aime l’adversité, comme le brave soldat aime la guerre. J’ai vu, sous Caligula, Triumphus le mirmillon se plaindre de la rareté des jeux : « Les belles années perdues ! » s’écriait-il.

Le courage est avide de périls : il songe où il tend, non à ce qu’il va souffrir : car les souffrances sont elles-mêmes une part de la gloire. Le guerrier est fier de ses blessures : il étale avec complaisance le sang qu’il est heureux de répandre ; et au retour de la bataille, quoique les autres aient aussi bien fait, les regards s’attachent surtout aux blessés.

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